Il y avait un petit moment que je ne l'avais rencontrée et ce matin nos chemins se sont croisés, alors on a taillé une bavette sur le parking. Ça commence avec le basique : "Comment ça va ?" Sauf qu'elle a répondu : "Bof, pas trop bien..."
Toujours un brin souriante elle commence à parler de ses douleurs, partout, qui rendent la marche difficile, du moral bien bas. Je me souviens qu'elle a subi une opération et je me branche là-dessus. Mais je m'aperçois vite que j'ai dû louper un chaînon, elle ne parle pas de l'opération. Des allusions me mettent sur une autre piste : secouristes... pompiers... voisins... pourquoi ils ne m'ont pas laissée partir ? Ils auraient mieux fait de ne rien faire. Les secouristes ça ne devrait pas exister. Et puis : le Bon Dieu, on se demande ce qu'il fait ? Pourquoi il n'a pas voulu de moi ? Il m'a fermé la porte au nez et m'a renvoyée ici. Mais qu'est-ce que je fais ici ?
En effet j'avais zappé l'AVC, les voisins qui appellent les pompiers, le séjour à l'hôpital et le retour à la maison. Des douleurs de toutes sortes. Toute seule chez elle, parce que veuve et des enfants loin, très loin. Quelques amies quand même qui viennent faire une partie de cartes, mais les jours sont si longs quand on n'a plus de goût à rien et que les forces et les capacités déclinent. Et elle insiste : ils n'auraient pas dû... ils auraient dû me laisser partir.
Et là je me retrouve toute gauche et maladroite. Rien à répondre à ça.
Et ce n'est pas le moment de se réfugier derrière des paroles faciles ou
de prêcher. Juste continuer à l'écouter, l'encourager à retrouver ses amies de la belote,
Et combien d'autres ainsi ? Combien de personnes âgées (et même parfois pas très âgées), seules, sans plus de goût à la vie aspirent à "partir" ? Plus de projet, plus d'énergie, plus de raison de vivre. Après une vie bien remplie, l'envie de dire, à l'image du vieux Siméon, maintenant Seigneur ça suffit, laisse moi partir (Luc 2, 29).
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