mardi 1 octobre 2013

Tu ne pouvais pas dire non... (!) (?)

Quand la fusion avec une autre Congrégation a pris des allures d'accomplissement je pensais tout simplement et avec bonheur que c'en était fini pour moi des responsabilités en Congrégation. Rejoindre une Congrégation plus grande, plus vivante, avec davantage de forces vives, même si les aînées sont nombreuses, m'autorisait à penser : place aux plus jeunes.

Très vite après la fusion, à mon grand étonnement, j'ai été sollicitée pour des sessions, des formations, que j'ai acceptées, après parfois beaucoup d'hésitation. "On a pensé à toi" me disait-on. "J'aimerais mieux que vous ne pensiez pas tant à moi" répondais-je avec humour.

De sessions en formations, je me suis retrouvée au Chapitre cet été. Expérience un peu ardue, mais riche. Et là je pensais encore que c'était fini et qu'elles avaient compris que je n'étais pas encore vraiment dans le bain, ni tout à fait des leurs.

Et voilà qu'un jour de début septembre Marie-Louise me téléphone : il faut que je te voie. Ces mots dans la bouche d'une supérieure générale ce n'est jamais bon. Un peu à la Jésus avec Zachée* : "il FAUT que j'aille chez toi".

Le Caravage, l'Appel de Matthieu
(Église St Louis des Français, Rome)
Et là une nouvelle demande, déconcertante, déstabilisante, au service de la Congrégation. A mi-temps m'a-t-elle précisé, puis, et tu resteras dans ta communauté, comme pour me rassurer (hum, un mi-temps dans l’Église...). Spontanément j'avais vraiment plein de bonnes raisons pour refuser. [...]

Alors, après, des amis se sont risqués à l'immanquable "Tu ne pouvais pas dire non". Il y a plusieurs tons pour dire cela, c'est le ton qui fait la chanson, et alors ça s'écrit avec un point d'exclamation ou un point d'interrogation.

Si, je pouvais dire non, et refuser.
Si, je pouvais dire non, et rester dans mon train-train pénard, même si je ne m'y ennuie pas, que le travail abonde et qu'il me passionne.
Si, je pouvais dire non, mais j'en sentais le goût amer et confus de rater quelque chose.
Si, je pouvais dire non, à chaque fois, à chaque étape.
Si, je pouvais dire non, car on peut dire non dans la vie religieuse.

Mais j'ai accepté, consciente à chaque fois qu’une exigence en naîtrait, consciente aussi qu'un oui peut ouvrir sur un autre appel, qu'un non ferme des portes.
Mais non, j'ai dit oui, j'ai accepté comme une réponse à plus grand que moi, malgré mes manques, mes incompréhensions, mes questions, mes appréhensions, mes peurs. Accepté une aventure dont je ne sais absolument rien ni où elle me conduira, comme un départ, comme une grâce et une chance dans l'exigence.

Rien ne t'arrive qui ne puisse te faire grandir, à toi d'en faire le meilleur usage.

Je laisse le mot de la fin à un curé à qui il a dû arriver quelque chose de semblable, et que j'ai piqué sur Facebook (il faut bien quand même, je ne renie pas mes passions) : L'Esprit Saint nous réserve parfois de drôles de surprises auxquelles on n'est pas préparé. Je lui fais confiance, il doit savoir ce qu’il fait.

* Évangile de St Luc, chapitre 19, verset 5