dimanche 10 novembre 2013

Une vie si cabossée

Cette semaine les équipes d'animation pastorale des lycées St Joseph et St Louis de La-Roche-sur-Yon avaient invité le Père René-Luc pour les jeunes de leurs établissements. Et pendant qu'il était là, ils ont offert aussi une soirée tout public.

René-Luc est prêtre  du diocèse de Montpellier où il exerce son ministère auprès des étudiants, connu pour son livre autobiographique "Dieu en plein cœur", ses homélies du dimanche matin à l'émission du Jour du Seigneur et ses vidéos sur Youtube.

Auprès des jeunes ou en conférence grand public il a donné son témoignage, plutôt choc que chic*. Témoignage d'une enfance et adolescence complètement cabossées et d'une rencontre qui va bouleverser sa vie. Comme on dit : il vient de loin. Pour qui avait lu son livre, rien de bien nouveau si ce n'est le ton, l'énergie et le dynamisme du témoignage oral.

Pour cette soirée l'amphi de l'ICES était archi plein, certains étaient même debout ou assis par terre. Rarement cet amphi a vu tant de monde à la fois. Notoriété de l'invité ?... Curiosité de le voir en chair et en os ? Tout simplement envie de rencontrer un témoin et d'être contaminé par son dynamisme et sa foi.

Je ne raconterai pas son histoire, il le fait bien mieux et avec beaucoup d'humour pour dire beaucoup de souffrance. Mais au cours de cette soirée je me suis laissé prendre par son punch et sa rage de vivre. J'ai été émerveillée, comme tout le monde, par ce récit, plutôt happy end, d'un enfant qui va de traumatisme en traumatisme et qui, finalement s'en sort, comme on dit. En me demandant pourquoi et comment ce happy end ? Il aurait pu continuer loubard ou truand... La grâce de Dieu l'a conduit, sûr, et c'est la foi qui nous le dit. La force de la fratrie aussi... Une ou deux rencontres décisives qui vont tout bouleverser.

Et l'histoire finit bien... malgré aussi un très grave accident de moto en 2012 (dont il ne parle que si on l'interroge dessus, d'ailleurs).

Pour lui, ça finit plutôt bien... Mais je ne peux m'empêcher de penser à tant d'autres, enfants et ados, qui ne s'en sortent pas, victimes aussi d'un père -d'une mère- malade, alcoolique, violent, truand... Qui n'ont pas près d'eux des frères et sœurs soudés, parents, amis, une Marie-Do... pour les aider. Bien sûr de ceux-là on ne parle pas, sauf dérapage de leur part. Trouveront-ils une Marie-Do sur leur chemin pour les écouter et les aider ?... 


* Le témoignage choc, à l'image de celui de Saint Paul, converti après un passé chaotique. Et en écho au témoignage chic, comme celui de Jean, le jeune qui a toujours été dans la foi sans trop se poser de questions sur cette foi.

lundi 4 novembre 2013

"Putain de loi sur l'euthanasie !"

Ils discutent du sujet tous les deux, devant moi. Le sujet ? L'euthanasie.
Lui, plutôt d'accord. Peut-être parce que plus directement concerné et confronté à la question. Elle plutôt pas d'accord, un peu moins concernée, pas de la même façon en tout cas.

Ils ne sont pas d'accord et ont du mal à comprendre leurs positions respectives. Et moi au milieu... je crois que je les comprends tous les deux.

Mais moi, en plus j'ai la foi, chrétienne. Et ma foi me dit que Dieu seul est maître de la vie et de la mort, et que l'homme n'a aucun pouvoir dessus. Alors ça me gêne un peu parce que d'emblée nous ne sommes pas sur le même registre. Je ne leur assène pas cette vérité.
Et je n'ai rien à opposer à qui est au bout de la vie, sans plus aucune raison de vivre, sans force, sans goût, sans projet si ce n'est celui de fermer le livre de la vie.

Qui suis-je pour faire la leçon ? Même une leçon de foi. Qu'est-ce que j'ai comme argument à faire valoir en face de cette souffrance devant l'absurde ? Je me sens démunie et tellement partagée entre ma foi et la souffrance qui s'exprime.

"Et cette putain de loi sur l'euthanasie qui n'arrive pas. Elle existe dans d'autres pays, qu'est-ce qu'on attend en France ?"
J'ai du mal à le contrer tellement je comprends l'objection dans ce contexte.

Bien sûr j'ai lu les déclarations contre l'euthanasie, les dernières en particulier, du Cardinal Barbarin, la réflexion de Mgr Brouwet...
Bien sûr je n'ai pas vraiment envie de passer à l'acte et cela soulève des montagnes de questions, et c'est là que je la rejoins, elle, qui n'est pas d'accord.
Mais j'ai du mal à comprendre. Moi non plus je ne me sens aucun droit à forcer quelqu'un à vivre et qui est vraiment au bout. Facile de faire la leçon quand on est en bonne santé, et en forme. Oui, malgré ma foi je comprends cet appel au secours... et je n'ai pas de réponse.

Il faut dire qu'en plus on n'est pas aidés par un corps médical qui s'enferme dans un mutisme méprisant et anxiogène, par des administratifs d'ici et de là séquestrés dans leurs règlements bornés qui les dispensent de chercher à comprendre.

N'oublions pas aussi que le suicide des personnes âgées est plus fréquent qu'on ne veut bien le reconnaître. Encore plus tabou que le suicide des jeunes. Et c'est le taux le plus élevé pour la tranche d'âge concernée. Ça veut bien dire quelque chose, non ? Mais de ça on ne parle pas.

Oui, je sais, on va m'opposer l'accompagnement de fin de vie... alors là il y a de quoi faire !