vendredi 30 août 2013

Nous (n')irons (pas) tous au paradis

Aujourd'hui la liturgie nous fait lire et méditer l'histoire des 10 filles sages et fofolles (non mais les garçons la métaphore c'est aussi pour vous, hein). Spontanément ce passage me rappelle deux homélies de cet été. Lues à la va vite, faute de temps à ce moment-là (oui, même en soi disant vacances) j'avais quand même remarqué que 2 fois sur 3 il disait en gros que le paradis ce n'est pas ipso facto. C'est surtout l'insistance qui a attiré mon attention : 2 homélies de suite. Pourtant, François*, ce n'était certainement pas le point le plus important que tu voulais faire passer, mais c'est ce que j'ai pris et tu sais bien que souvent ce qui touche ce n'est pas ce qu'on avait prévu.

Ah bon, le paradis ce n'est pas gagné d'avance ? Ne le croirait-on pas parfois ? Un peu comme si le baptême et quelques bonnes pratiques suffisaient. Je vais à la messe, je prie un peu, je partage, je fais partie du MCPCM*, j'essaie d'aimer mon prochain et de lui rendre service... ça ne suffit donc pas pour un billet d'entrée au paradis ?...

Sous couvert de la bonté de Dieu, son amour et son pardon infinis, son dessein de vouloir notre bonheur à tout prix et de nous faire partager le sien, on en a oublié un peu qu'il fallait mettre la main à la charrue et qu'au bout de la vie on n'est peut-être pas encore tout à fait prêt. Bien sûr l'évangile ne cache pas ça mais nous l'avons parfois un peu occulté. Pourquoi ?

Dans cet immense mouvement de libération que fut Vatican II, peut être un peu euphorique au début, mais vraiment ça se comprend, on est passé du Dieu-père-fouettard au Dieu-Père tout court, du Dieu-gestionnaire-de-sacrifices au Dieu-Amour qui donne sans compter, qui pardonne, qui ne veut que le bonheur de ses enfants. Donc il ne peut que nous accueillir à bras ouverts dans son paradis, malgré nos frasques, et même les mécréants y seraient les bienvenus. Et voilà comment on passe d'un extrême à l'autre.

Un des avantages d'avoir un peu de bouteille c'est de pouvoir prendre le recul du temps et de voir ce mouvement de balancier inéluctable dans la vie des hommes soumis au temps et donc aussi de l’Église. Je parle ici du paradis mais les sujets ne manquent pas dans la vie de l’Église d'aujourd'hui qui seraient à voir dans cette perspective. Et voilà que cinquante ans après, on ressort Vatican II des cartons pour son anniversaire, et on le relit paisiblement, objectivement avec le recul et la richesse de 50 années de mise en œuvre, tâtonnante, osée, courageuse, enthousiasmée et enthousiasmante.
Jean XXIII avait dit "ouvrons les fenêtres" et on s'est pris une bouffée d'air frais enivrante. Maintenant que l'air est renouvelé et qu'arrivent dans la maison nos enfants qui n'ont pas connu l'air confiné ouvrons ensemble Vatican II, lisons-le ensemble, goûtons-en toute la richesse, vivons-le ensemble, ajustons-nous ensemble à son enseignement puisque, en fait, tous nous nous réclamons de Vatican II.

Pour en revenir au titre... si je crois bien que nous irons au paradis, mais il faudra peut-être un temps d'ajustement. Un temps ?... Heu c'est quoi un temps quand on est face à l’Éternel ?...

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* Non, pas le pape, juste le curé de la paroisse.
* MCPCM : Mouvement Catho Près de Chez Moi


dimanche 11 août 2013

Dis, l'avion il va taper dans l'étoile

On avait passé une belle journée d'été, de flânerie dans Arcachon, la ville à la baie si merveilleuse. Enfin du chaud soleil. Montée au belvédère pour une vue magnifique à 180° sur la baie. Lui, un peu fatigué par son travail de nuit, elle docile, tantôt solitaire tantôt énervée, peut-être lasse d'être seule ado avec des adultes.

Après dîner la nuit est déjà un peu fraîche, les premières étoiles apparaissent une à une, les étoiles filantes, c'est à qui en verra le plus.

Et puis on s'installe sur les chaises longues, le silence lui aussi s'installe en même temps que la nuit se fait plus dense. Plus de concours d'étoiles filantes, plus de commentaire. La contemplation du ciel étoilé suffit : méditation pour les uns, prière pour d'autres.

Un avion entre dans le ballet des étoiles, Manon interroge : Quand on est dans l'avion, est-ce qu'on voit les étoiles ?... Et l'avion, là, il va taper dans l'étoile !... Je n'ai même pas envie de rire mais simplement ça redonne un cœur d'enfant, ça fait du bien des questions d'enfant qui renvoient à l'infiniment grand, au mystère de l'univers et de la création. Non, Manon, l'avion ne va pas taper dans l'étoile. La distance entre lui et nous est insignifiante par rapport à la distance entre lui et l'étoile. Il n'y a aucun risque. Je me sens soudain un peu Saint-Exupéry face à son petit prince. Alors mon petit prince est devenu tout calme et contemple le ciel étoilé, silencieux lui aussi.

C'est la nuit des étoiles paraît-il... et les étoiles ça fleurit mieux à la campagne qu'à la ville, alors on prend le temps de les regarder, de se re-poser en les contemplant.

dimanche 4 août 2013

Apprivoise-moi

Comme certains rentrent des JMJ, moi je rentre de Chapitre. Trois semaines aussi, même durée, même période (enfin presque). Je ne reviens pas sur ce qu'est un Chapitre, je l'ai déjà bien expliqué dans des billets précédents, mais quelques impressions, après coup, quand ça commence à décanter.

J'y allais de bon cœur, même si la durée me faisait un peu peur, avec confiance et espérance, heureuse de l'expérience que j'allais vivre et reconnaissante de la confiance qui m'était faite, car un Chapitre c'est aussi une responsabilité face à la Congrégation.

"Apprivoise-moi"
Et puis un Chapitre je savais ce que c'est, j'en avais déjà vécu plusieurs, même si celui-ci était quand même différent des autres de par ma situation dans la Congrégation. Justement j'allais vivre ça comme un temps de connaissance de la Congrégation et des Sœurs, et en particulier celles des autres pays. Donc tout allait bien, l’aventure pouvait commencer. Mais voilà... très vite je me suis rendu compte qu'il ne suffisait pas de multiplier par trois le nombre de jours et le nombre de Sœurs, mais qu'il y avait un dépaysement beaucoup plus profond. Très vite je me suis rendu compte qu'il me manquait une expérience de la Congrégation, une connaissance intérieure faite de l’enracinement dans la durée, et que je ne suivais pas aussi bien que je l'avais pensé...  pas à la hauteur, quoi.  Tentation de baisser les bras et de laisser filer. J'ai changé mon fusil d'épaule, passant d'une participation que j’ambitionnais constructive-visible à une participation de fondation, plus effacée. Et puis on m'avait demandé un service, en lien avec quelques compétences, alors j'ai mis tout mon cœur à le faire de mon mieux. Ça décape un peu et ça remet des choses en place.

Donc trois semaines pour relire les six dernières années, élire une supérieure générale et son conseil et se donner un projet pour les six années à venir. Tout cela préparé en amont depuis plus d'un an par toutes les Sœurs  de la Congrégation et repris dans nos travaux de groupes et/ou d'assemblée. Groupes variés : imposés, sur place avec les voisines, par âge, par pays, par choix de thème. Avec nous, pendant ces trois semaines, pour accompagner notre réflexion, une animatrice et un prêtre du diocèse, et un Jésuite pour le temps de discernement précédant les élections. Leur présence, chacun dans son rôle, nous a été précieuse.

Au milieu du parcours il y eu l'élection de la Supérieure générale et de son conseil au terme de deux jours de discernement et de prière.C'est une Sœur de Madagascar qui a été élue. C'est drôle comme cette année le Saint Esprit a un penchant pour le Sud... Pour une Congrégation fortement enracinée depuis deux siècles dans le diocèse de Luçon et dans le peuple de Vendée, qui a su et eu l'audace de s'ouvrir à d'autres pays cette élection est encore un signe d'ouverture, de partage et de désappropriation.

 De cette expérience je garde aussi le bonheur d'avoir rencontré des Sœurs d'autres pays, d'avoir découvert leur jeunesse et leur dynamisme, d'avoir pris conscience de leur nombre et de leurs compétences. De même pour les associés : leur nombre et leur dynamisme. Ça fait tomber quelques préjugés plus ou moins conscients.

Un Chapitre c'est un vaste chantier. Il est saisissant de voir comment les idées, les propositions, les points de vue différents, les discussions entre nous, en groupes ou en assemblée, avec les associés les premiers jours, arrivent à prendre forme dans un texte global, accepté par toutes, qui soit dynamisme de vie et de mission pour toutes pour les six années à venir. Cela ne peut être que le fruit du travail de l’Esprit (et du nôtre un peu quand même !), de la prière des uns et des autres.