
Le remariage des divorcés est une question difficile et douloureuse dans l'église catholique. Pour faire court tout le monde sait qu'ils n'ont pas droit à un nouveau sacrement et ils vivent cela comme un rejet et un échec supplémentaire à ce qu'il perçoivent déjà comme un échec de leur couple. Cela occasionne moult critiques vis-à-vis de l’Église et beaucoup de souffrance.
Micheline et Denis sont de ceux-là et ils ont fait le pas, hier, en s'engageant l'un envers l'autre dans le mariage. Mariage civil. Mais au nom de leur foi ils souhaitaient inscrire cet engagement dans leur chemin de foi. Leur chemin ensemble depuis une bonne dizaine d'années est un chemin douloureux de recherche entre rejet, culpabilisation, révolte contre la position de l’Église en même temps que confiance en une possible évolution. Chemin cahoteux et confiant tout à la fois. Chemin de rencontres, d'ouverture, de dialogue, de remise en cause.
Alors samedi ils ont voulu qu'on prie avec eux et pour eux avant d'aller à la mairie.
Soyons clairs. Ce n'était pas une messe ni même une bénédiction comme on l'entend pour des célébrations de mariage, il n'y a pas eu de sacrement. Mais on a prié ensemble avec un prêtre et une belle assemblée d'amis. Des chants, un beau texte de Martin Gray, un passage d'évangile, une prière universelle, un Notre Père. Les mariés dans leur mot d'accueil, puis le prêtre dans son homélie ont bien situé la démarche : prier ensemble, confier au Père l'amour de Micheline et Denis, rendre grâce pour le rude chemin déjà fait ensemble et celui qu'ils vont continuer.
Et on ne s'y trompe pas. Quelques signes confirmaient la différence avec un mariage à l'église, selon la formule consacrée :
- chronologiquement, et c'est important, ce temps de prière était avant le mariage à la mairie (alors que pour un mariage religieux il faut d'abord passer par la mairie),
- le prêtre était en aube mais sans étole, il ne se tenait ni à l'autel ni au siège de présidence,
- la mariée portait un simple et très sobre tailleur blanc et n'a revêtu une robe de mariée qu'à la sortie de la mairie.
Dans certaines paroisses l'animation de ce temps de prière est confié à des laïcs. Je me réjouis que ce soit un prêtre qui l'ait assuré ici. Cela dit quelque chose de l'ouverture et de l'accueil de l’Église, de l'attention du clergé local à cette question.
A l'automne prochain, du 5 au 19 octobre, doit se tenir à Rome le Synode des évêques sur la famille. Cette question des divorcés-remariés est à l'ordre du jour. Les attentes sont fortes pour que l’Église continue l'ouverture amorcée par le Pape François, y compris dans ce domaine. "Nous devons écouter la douleur de l'échec... il faut accompagner et non pas condamner ceux qui connaissent l’échec de leur propre amour... marcher de l'avant avec eux" dit le Pape François.
Chaque situation est à prendre en compte pour elle-même. Chaque couple a son histoire, son chemin, ses chutes et ses espérances, sa vie de foi. Il ne s'agit pas de galvauder le sacrement du mariage, mais d'accueillir ceux qui ont été blessés par un échec et ne pas les rejeter de l’Église.
J'ai été heureuse de participer à ce temps de prière avec Micheline, Denis et leurs amis. Heureuse qu'ils se sentent accueillis dans l’Église, souhaitant qu'ils y trouvent leur heureuse place, et que cela se passe dans ma paroisse. Heureuse de ce germe d'espérance. Leur route continue, de même que la recherche de solutions qui s'appuient sur la miséricorde de Dieu. Amis divorcés-remariés, gardez confiance !
NB - Un grand nombre d'articles sont parus sur ce sujet dernièrement, ci-dessous quelques uns des derniers publiés dans La Croix :
- L'accueil des divorcés-remariés, le casse-tête des cardinaux pendant le consistoire (23-02-2014)
- Le Pape invite à ne pas "condamner" lorsque l'amour échoue (28-02-2014)
- Divorcés-remariés, les 5 conditions du Cardinal Kasper (03-03-2014)
- Divorcés-remariés, le cardinal Müller défend la doctrine (31-07-2014)
- Document de préparation du Synode sur la famille, et questionnaire (04-11-2013)
- "Divorcés remariés, la chance de Marie-Madeleine". Marcel Metzger, ancien directeur de l'Institut de droit canonique à Strasbourg (19-08-2014)
Voir aussi :
- Dossier du Synode sur la famille, sur le site de l’Église de France